Vivant aux Etats-Unis d'Amérique, mon ami Jacques-Yves Tapon, journaliste professionnel, m'adresse un point de vue intéressant sur la situation de l'Europe face aux problèmes migratoires et aux Etats-Unis.
Voici ce texte qui contient matière à réflexion, en remerciant son auteur d'avoir pensé à Mon Petit Journal d'ici et d'ailleurs, lequel établit un pont au dessus de l'Atlantique !
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L'Europe va mal, si tant est qu'elle ait jamais existé. A mes yeux, elle ne consiste qu'en une zone de libre-échange, ouverte à tous vents et à la mondialisation, incapable de répondre aux défis qui s'imposent à elle. La question des “migrants” en est une parfaite illustration.
Des milliers de gens en détresse, chassés de leurs pays pour fuir la guerre, la pauvreté, voire des changements climatiques aujourd'hui inéluctables, tentent de traverser la Méditerranée pour rejoindre ce qu'ils considèrent, non pas comme un Eldorado, mais comme une planche de salut. Beaucoup d'entre eux périssent noyés dans la grande bleue. Je n'irai pas passer mes vacances sur la Côte d'azur : je n'aime pas trop la proximité des cimetières, fussent-ils marins (à l'exception de celui de Sète, où j'ai retrouvé Georges Brassens et Paul Valéry ).
La première réponse de l'Europe, c'est le traité de Dublin, à savoir : tout migrant débarquant en Europe doit être pris en charge par le pays où il accoste. Donc l'Italie, très majoritairement. Bien commode pour tous les autres partenaires européens, dont la France, qui peuvent tranquillement s'en laver les mains. Mais le système a ses limites, et nous venons de le découvrir naïvement : l'Italie, à force d'accueillir, s'est retrouvée dans une impasse, la France elle-même refoulant les fuyards à la frontière. Le résultat ne s'est pas fait attendre: les vieux démons d'extrême-droite se sont réveillés.
Dans d'autres pays européens, et parfois pour d'autres raisons, on assiste au réveil des nationalismes les plus extrêmes. C'est le fruit d'un système exclusivement fondé sur les échanges économiques, qui s'est révélé incapable d'organiser une harmonisation fiscale et sociale, qui a basé son action sur la concurrence entre les pays, et qui n'a pas su le fédérer autour d'une identité commune.
L'Europe, aujourd'hui, risque d'en payer le prix.
Aux Etats-Unis, où je vis encore aujourd'hui, le Président semble fantasque, et il l'est souvent, avec ses tweets matinaux qui disent sans cesse une chose et son contraire. Il est plus que contestable dans sa manière de fermer les frontières aux immigrés illégaux. Mais que l'on ne se méprenne pas : cet homme sait exactement où il va. “America great again” n'est pas qu'un slogan. L'économie étasunienne va de mieux en mieux, le chômage a considérablement baissé, au moins 350 millions de dollars d'entreprises exilées ont rejoint la mère patrie.
Aujourd'hui, M. Trump a décidé de s'en prendre au reste du monde. A la Chine, d'abord, mais elle a suffisamment d'atouts dans sa manche pour ne pas trop s'inquiéter. A l'union Européenne, ensuite. Là, les choses sont beaucoup plus compliquées. En décidant une taxe douanière de 20% sur les véhicules européens, ce qui touche surtout l'Allemagne, et, un peu l'Italie, il se contente de montrer ses biceps. Le pire est à venir. Si les grandes banques américaines ont su se renforcer après la crise de 2008, ce n'est pas le cas de beaucoup d'établissements européens qui ont montré leur faiblesse face aux crash tests.
Si l'on ajoute à cela que le nouveau directeur de la FED, la banque fédérale américaine, est un très proche du Président, et que la FED peut intervenir sur tous les marchés du monde, juste en jouant sur ses taux d’intérêt, et qu'elle a la possibilité de créer ex-nihilo des milliards de dollars... Alors, l'Europe a de quoi s’inquiéter.
Jacques-Yves TAPON
journaliste