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A Flavigny-sur-Ozerain : réhabiliter la race ovine par le truchement de Galatée la blanche brebis
Quel joli retour nous avons fait au beau village, qui a tout d'une ville, de Flavigny-sur-Ozerain où nous avons retrouvé avec bonheur la Maison des Arts Textiles et du Design qu'anime passionnément Marie Algranate nous proposant, en son jardin dominant la campagne bourguignonne, une rencontre étonnante.
Une rencontre avec Galatée qui fut aussi l'occasion de réhabiliter la race ovine en général et le mot mouton en particulier, mot trop souvent chargé de connotations péjoratives, voire mystiques, qui ne sont pas forcément au goût de tous.
Galatée personnage mythologique
En effet, la brebis Galatée, portant le nom de la blanche nymphe amoureuse d'un berger dans la mythologie grecque, fait par son comportement inattendu, explique sa propriétaire, la preuve qu'elle a du caractère, qu'elle est à la fois vive, intelligente et affectueuse.
Portant sur son dos la plus chaleureuse des matières textiles, Galatée trouve parfaitement sa place, dans l'un des plus beaux villages de France où elle est promenée en laisse comme un bon toutou, et dans l'environnement d'un musée évoquant toutes les fibres naturelles indispensables à l'homme.
Depuis cinq années, elle est donc devenue véritablement la mascotte du haut lieu de culture fondé dans l'atelier du regretté Daniel Algranate dont Marie perpétue et poursuit la démarche, donnant du sens à tous ces objets touchant à la Bourgogne, aux outils, aux textiles naturels et à leur utilisation artisanale avec des techniques anciennes, purement manuelles.
Mais revenons à la brebis Galatée qui par sa présence et ses attitudes, fait le lien, joue un rôle de médiatrice entre son monde et le nôtre, un lien dont notre société a besoin, dans un environnement de plus en plus mécanisé, standardisé, artificiel, voire virtuel. L'animal contribue donc ainsi à nous « empayser*** ».
Retrouver les racines perdues
Avec la brebis, nous retrouvons une expression particulièrement concrète de la vie naturelle, de laquelle l'homme, pour son grand déséquilibre, s'est trop éloigné, perdant les racines qui doivent l'unir à la planète.
A l'origine, il y a cinq ans, Daniel et Marie Algranate, qui ne connaissaient pas les ovins, mais en aimaient la laine, ont voulu découvrir l'animal pourvoyeur de la noble matière, choisissant la race Mérinos de Bourgogne car bien ancrée dans ce terroir puisque ses origines historiques remontent au travail du naturaliste Louis Jean-Marie D’Aubenton, dit Daubenton, collaborateur du fameux Buffon en la ville proche de Montbard au XVIIIe siècle. Tout se tient donc comme vous pouvez le constater !
Le Mérinos, indique Marie, est un mouton magnifique, mais peu prolifique dont l'existence ici (dit-elle en lui passant la main dans la toison bien repoussée après la tonte du mois de mai) montre combien cette matière est d'origine vivante.
Mais surtout, un mouton au quotidien, c'est une présence, à l'instar de celle d'un toutou, qui offre une compagnie de grande qualité. De tempérament apaisant, la brebis, douce, sensible et douée de compréhension, est un animal qui répond aux sollicitations. Je la trouve même expressive dans sa façon de renifler. Galatée est donc bien loin de la bêtise prêtée quelquefois à sa race. Incitée par sa gourmandise, elle a appris à donner la patte comme un chien et à faire le piaffer comme un cheval.
Elle aime jouer et manifestement veut faire plaisir. Elle va même, avec vivacité, au devant de sa maîtresse pénétrant dans son enclos, pour l'accueillir ou lui réclamer une friandise.
Nous sommes donc loin d'une bête amorphe et docile évoquant les moutons de Panurge.
A l'école de la brebis
Si la brebis a beaucoup appris de son environnement humain, elle s'est aussi, par ses besoins, montrée bon professeur pour sa bergère, lui enseignant à accomplir les soins que son bien-être exige : de la tenue de la bergerie et des exigences alimentaires, au parage des pieds et à la douche dont elle apprécie l'action bienfaisante par temps de canicule.
Dans l'environnement d'un musée rural la présence d'une brebis se trouve très en phase avec la tradition d'un terroir où le mouton apporta beaucoup, tant par l' indispensable laine d'avant l'époque du synthétique, par sa viande particulièrement saine, que par l'usage qu'on en faisait dans le vignoble de Bourgogne : c'est le mouton, explique Marie, qui en paissant était chargé de nettoyer écologiquement les vignes et par la même occasion d'en engraisser le sol.
Galatée contribue donc à la remise à l'honneur, car en portant bien des valeurs, « d'un monde rural dont l'univers industriel ne veut plus » conclut Marie qui rêve maintenant d'adopter un bélier, mâle au plus fort caractère. Une démarche sans doute peu raisonnable mais l'amour n'est-il pas capable d'accomplir des miracles ?
Toujours est-il que le meilleur moyen de faire la connaissance du petit monde de Marie, de la Maison des Arts Textiles et du Design, de la blanche Galatée, de son aimable fils musicien, c'est sans doute de venir passer une nuit dans ces chambres d'hôtes de la Maison du Tisserand, installées à Flavigny-sur-Ozerain dans une demeure de pierre cinq ou six fois centenaire dont les fenêtres donnent sur un magnifique panorama agreste...
Un panorama dont quelque troupeau laineux ne déparerait pas le bucolique tableau...
*** On retrouve ce mot imagé d'empayser utilisé par Marie dans le Lexique de l'ancien français proposé par Frédéric Godefroy sur wikisource.org/ : empayser, v. a., acclimater.
Retrouver ici mon article précédent :
Site du musée : http://www.algranate.com/