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Sur les ailes de ses choix poétiques, embarquement, en TGV avec Pompidou !

Le TGV file, les paysages défilent, des collines de Bourgogne aux riches plaines d'Île-de-France... Dans mes mains un livre. Y filent et défilent aussi, comme à la parade, six siècles de poésie française. J'y flâne comme dans un paysage. Un peu au hasard, c'est si plaisant, si plein de surprises, et voici que je lis « Poète prends ton luth ; le vin de la jeunesse / Fermente cette nuit dans les veines de Dieu. » Bonjour Musset. Quelle inspiration extraordinaire ! Je ne peux rester muet. Ma voix passe par la plume. Je sors mon stylo à billes, quatre couleurs, je recopie en rouge ces vers pour le plaisir, mais le roulis du train a refermé le bouquin qui s'ouvre tout seul à une nouvelle page, marquée semble-t-il par plusieurs consultations. Forcément. C'est le père Hugo qui avoue son âge : « Ce siècle avait deux ans... Si parfois de mon sein s'envolent mes pensées... »

Mais je n'ai pas envie, ce matin, d'entendre son « âme aux mille voix », il me faut, alors que le soleil timide perce les nuages, quelque chose de moins grandiloquent. J'ai besoin d'un ton autre, d'un propos différent, et puisque j'entreprends un voyage, pourquoi ne serait-ce pas jusqu'à Cythère avec mon pote préféré, (pardon poète, j'avais oublié le « è ») Baudelaire. L'auteur des Fleurs du Mal comble mes fantasmes avec cette « jeune prêtresse, amoureuse des fleurs, » qui « allait, le corps brûlé de secrètes chaleurs, entre-bâillant sa robe aux brises passagères... »

Est-ce bien raisonnable ? Pour refroidir mes ardeurs, je file chez Valéry et là point besoin du recueil, le propos me revient tout seul en mémoire : « Le sang qui brille aux lèvres qui se rendent...Les derniers dons, les doigts qui les défendent...Tout va sous terre et rentre dans le jeu... »

Finalement, la réflexion n'est pas bien gaie, elle ne correspond pas vraiment à mon humeur, alors pas besoin de m’appesantir, ni de revenir chez Baudelaire qui va m'évoquer l'essence divine de ses « amours décomposés ». Je préfère à nouveau faire confiance à la chance, et la page 180 s'adresse ainsi à moi : « Allez, vous êtes fou dans vos transports jaloux... »

J'ai alors envie de répondre à la Célimène du Misanthrope de Molière « Ah ! Traîtresse (...)Vous me trompez sans doute avec des mots si doux » et je m'échappe, je remonte dans le temps, je fouine dans les premières pages de l'ouvrage jusqu'à ce que Villon me demande : « Mais où sont les neiges d'antan ? »

Foin de la reine Blanche et de Berthe au grand pied, comme je ne suis plus d'humeur nostalgique, je saute jusqu'au début du livre, un livre de poche au dos cassé que j'ai déjà donné, racheté, perdu, acquis à nouveau et dont le signataire me parle.

Dans la poésie plus qu'ailleurs, insiste-t-il, il faut avoir « le don », don qu'il qualifie même de divin. Divin ? Je pardonne cette interprétation, de l'origine du talent, tant à Georges Pompidou qu'à Victor Hugo, si enclin à s'adresser à l'être suprême qu'il adore. Alors que personnellement, je ne fais pas grâce à Dieu de m'avoir privé de cette maestria innée!

Georges Pompidou, successeur de Charles de Gaulle ! Si je n'ai pas suivi, politiquement parlant, ce fils de paysans cantaliens illustrant bien la promotion sociale par l'instruction publique, je lui reste reconnaissant de m'avoir offert, je crois dès 1961, ou un peu après, le meilleur des compagnons de voyage, que j'ai trimbalé de Moscou à Mexico. Poussé par le florilège de l'ancien président de la République, j'irai bien au bout du Monde, ou du moins, avec émotion, jusqu'à la Loire de Du Bellay jaillissant d'une argentine fontaine, jusqu'au fleuve de Villequier où la douleur de Victor Hugo est si présente, au bord de la Seine assassine...

Seine au bord de laquelle j'étais il y a quelques jours, bien en amont, à Nogent.

Nogent-sur-Seine qui parle de Flaubert puisque l'auteur de Madame Bovary a situé au bord des eaux calmes « L'Education sentimentale ».

Une citation pour conclure : Jean-Pierre Rivière, lu quelque part sur le net, a joliment dit de l'anthologie fleuve de Pompidou : « Ce phare qui perce un univers immense et fou... »

Un fanal que j'emporterai sur une île déserte...

Sur les ailes de ses choix poétiques, embarquement, en TGV avec Pompidou !
Sur les ailes de ses choix poétiques, embarquement, en TGV avec Pompidou !
Tag(s) : #Voyage, #Art
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